Les quatre vérités -suite- (conférence 4) 16/03/2006
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A.
Gouvret
Quelques informations : Le script de ces conférences ainsi que leur enregistrement audio sont consultables sur internet: http://www.miaofa.com/accueilconferences.html. Ainsi ceux qui auraient manqué une session ou qui nous rejoindraient en cours de route, pourront écouter ou lire la séance de leur choix. |
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Nous allons poursuivre aujourd'hui l'étude du système dit des quatre vérités et examiner dans le détail les deux premières d'entre elles. Pour bien comprendre l'aspect dynamique de ce système, je voudrais rappeler succintement ce qui a été vu la fois précédente. Parmi les premiers textes qui relatent ce système, nous trouvons notamment le Sutra de la mise en mouvement de la roue de la loi : "O moines, la naissance est souffrance, la vieillesse est souffrance, la maladie est souffrance, la mort est souffrance, la fréquentation de ceux que l'on déteste est souffrance, la séparation de ceux que l'on aime est souffrance, la non obtention de ce que l'on désire est souffrance et, finalement, tout ce qui touche au corps ou à l'esprit est souffrance. Telle est la noble vérité quant à la souffrance. Et maintenant, ô moines, menés dans le cycle des renaissances, nous sommes avides de joie. Partout un désir puissant nous fait espérer plaisirs et bonheurs. Il s'agit de l'attachement aux désirs, à l'existence et à l'anéantissement. Telle est la noble vérité de l'origine de l'apparition de la souffrance. Mais, ô moines, que cette soif et ces désirs soient apaisés sans reste, abandonnés, écartés sans attachement, voila la noble vérité de l'extinction de la souffrance. Car, ô moines, la vue juste, la pensée juste, la parole juste, l'action juste, le moyen d'existence juste, la progression juste, l'attention juste et la concentration juste constituent l'octuple voie qui est la noble vérité de la voie de l'extinction de la souffrance " |
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II Définition de chacune des quatre vérités (suite) 3 La vérité de l'extinction Le terme sanskrit est nirodha qui signifie obstruction, suppression. Ce substantif vient du verbe nirudh : obstruer, bloquer, réprimer. Les Chinois ont traduit ce concept par le caractère mie (滅). Examinons, comme nous en avons l'habitude, l'étymologie de ce caractère pour mieux en cerner le sens. La racine est l'eau et nous trouvons également un élément phonétique et le feu (火). Le sens est éteindre comme le fait de verser de l'eau sur un feu. Dans le Sutra des quatre vérités, il est dit que l'extinction est l'extinction des attachements, extinction parfaite et sans reste. C'est également l'apaisement consécutif à l'extinction de la souffrance, ce que bouddhisme appelle nirvana. Ce terme est déjà importé en Occident aussi devons-nous un peu le préciser. Etymologiquement l'expression nirvana signifie l'extinction du souffle (nirva). Il est précisé dans les textes primitifs : "les attachements ordinaires se délient, la colère se dissipe et la bêtise disparaît". Alors apparaît la condition indolore et sereine du nirvana. Comme nous le verrons par la suite nous sommes dans une démarche thérapeutique qui fixe les buts avant que de proposer les moyens de les atteindre. Un fois que l'on a déterminé le mal dont souffre le patient on fixe pour objectif la guérison. On peut dire que cette étape est purement normative toutefois, vu la forces des attachements, il n'est pas inutile de préciser clairement l'objectif recherché. |
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Il n'est pas inutile d'aborder ici succintement le sens du concept fondamental de voie dans la pensée chinoise. La voie désigne un chemin que peut parcourir celui qui s'y engage. C'est le dao (道) que l'on transcrit généralement tao et qui se prononce en japonais do et que nous retrouvons dans de très nombreux composés. Dans le système des quatre vérités, "voie" signifie façon de pratiquer qui mène au nirvana. La voie est constituée de huit disciplines, l'application et la vigilance dans ses huit disciplines à la fois entraîne une amélioration conséquente. Les huit voies (ou octuple sentier) sont : - la vue juste, façon correcte de concevoir les choses, - la pensée juste, discernement, lucidité, intention, - la parole juste, qualité des actes vocaux, - l'action juste, qualité des actes physiques, - l'existence juste, moyens d'existence, - l'effort juste, le courage et l'énergie dans la progression, - l'attention juste, la vigilance et - la concentration juste, qualité de l'esprit rassemblé. Voyons maintenant dans le détail chacune des huit branches de la voie. a) La vue juste : il s'agit de la vue lucide que procure la connaissance des principes bouddhiques. La réflexion sur ces principes permet de percevoir les évènements avec davantage de justesse. b) La pensée juste : la pensée qui précède l'action permet, en se fondant sur la vue juste, de rassembler les éléments nécessaires à une décision cohérente. c) La parole juste : importance de la parole parmi les divers actes produits. Une fois la pensée juste émise, des paroles justes doivent émaner de nous. Cet acte vocal doit exclure le mensonge, la médisance, la duplicité et les propos oiseux il doit amener bienveillance et justice. d) L'action juste : une fois la pensée juste émise, notre corps peut exprimer des attitudes justes qui excluent des actes de violence tels que le meurtre ou le vol, la luxure et exprimer le respect de la vie. e) L'existence juste : cette notion recouvre à la fois l'occupation professionnelle et la façon dont nous participons à la société mais aussi la discipline quotidienne relative aux choses courantes telles le sommeil, la nourriture, le mouvement etc. Elle permet au croyant du bouddhisme de mener une existence saine et cohérente. f) L'effort juste : il s'agit de poursuivre le chemin avec courage et vigueur. e) L'attention juste : elle porte à accorder aux différentes choses une vigilance assidue. Cette vigilance elle-même, se fonde sur les concepts bouddhiques. g) La concentration juste : si l'esprit est rassemblé, les choses de la vie quotidienne peuvent être abordées avec justesse et la sagesse bouddhique s'exprime. Bien que la vérité de la voie se divise en ces huit branches, il s'agit d'une façon unique et cohérente de vivre. |
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III Quatre vérités et processus thérapeutique L'action bienfaisante du Bouddha a souvent été comparée à celle d'un médecin. De fait, on voit que dès ses premiers enseignements il veut s'attaquer au phénomène de la souffrance et en annihiler les causes. Nous sommes donc bel et bien en présence d'un mode opératoire très proche du traitement de la maladie, sinon que ce n'est pas seulement de douleur physique ou de détérioration du corps dont il est question ici. La vérité de la souffrance correspond aux symptômes de la maladie, la vérité de l'apparition aux causes, la vérité de l'extinction à l'état de santé qui succède à la guérison et la vérité de la voie au traitement de la maladie. Ainsi, d'une façon pragmatique, les quatre vérités représentent la réponse apportée par le Bouddha à l'obscurité, cause des souffrances qui affligent les hommes. Le Bouddha donne ainsi, dès son premier enseignement, les moyens efficients pour que l'homme remédie lui-même à ses propres maux. Plus schématiquement nous avons donc les correspondances suivantes : |
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Notons que nous avons ici affaire à une démarche rationnelle et cohérente. Par cette représentation rigoureuse et claire, dès son origine le bouddhisme se différenciait des autres religions. Le premier message des autres religions est le plus souvent une explication mythique du monde ou de son origine. Dans le cas du bouddhisme, nous trouvons une explication des maux qui nuisent aux hommes, le moyen d'y remédier et le but à atteindre.
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Prochaine session, le 30 mars, nous parlerons de la production conditionnée. |