.Réponse à dame Onichi





   J’ai bien reçu les trois cents pièces, par l’entremise de moine Ben, puis deux cents cette fois-ci.

 La vénération envers le Bouddha ne s’exprime pas selon les choses1. Jadis, l’enfant Possession-Victorieuse2 fit offrande d’un gâteau de sable au Bouddha. Dans une existence suivante, il était le grand roi Asoka3 et devint souverain du Jambudvipa4.

  Une femme miséreuse se rasa la tête pour que ses cheveux servent à faire de l’huile5 et même le vent qui dévale du mont Sumeru6 ne pouvait éteindre la flamme ainsi allumée.

  Alors ces deux, trois ligatures7 représentent plus qu’une pagode ornée des sept joyaux8 issus de tout le pays et que celui qui gouverne le Japon aurait édifiée jusqu’aux trente-trois cieux.

  Un caractère du Sutra du lotus est comme la grande terre, les dix mille choses en proviennent. Un caractère est comme la grande mer, les multiples courants y aboutissent. Un caractère est comme le soleil et la lune qui éclairent les quatre cieux.

  Ce caractère en se transformant devient la lune et la lune en se transformant devient le Bouddha. Le grain en se transformant devient germe. Le germe en se transformant devient pousse. La pousse en se transformant devient riz. Le riz en se transformant devient homme. L’homme en se transformant devient bouddha. Une femme en se transformant devient le caractère myo et le caractère myo en se transformant devient le Bouddha Shakya sur la corolle9.

  Namu Myohorenguékyo, Namu Myohorenguékyo.

  Avec crainte et respect,

     Nichiren10




Onichi dono gohenji, Nichiren shonin ibun, Showa teïhon p. 1853

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1 C’est-à-dire selon les choses que l’on offre.

2 Possession-Victorieuse (Tokusho, Desheng). Egalement appelé l’enfant Possession Victorieuse ou, cela se prononce pareil en japonais ou en chinois mais le premier caractère de son nom change, enfant Vertu-Victorieuse. A l’époque où le bouddha Shakyamuni mendiait sa nourriture dans la cité de Maison le Roi (Rajagrha), un enfant qui n’avait rien à lui offrir confectionna un gâteau avec du sable et en fit offrande au Bouddha. La vertu de cette offrande permit à cet enfant de renaître dans une famille royale sous le nom d’Ashoka

3 Note à rédiger

4 Jambudvipa (Embudaï, Yanfuti) : d’après la représentation indienne antique du monde, l’un des quatre continents. Jambu désigne un arbre de haute taille aux feuilles triangulaires (eugenia jambolana) et dvipa signifie continent. Il s’agit donc du continent où pousse cet arbre. Dans cette conception, le monde comprend quatre continents qui sont disposés selon les quatre points cardinaux autour du mont Sumeru. Le Jambudvipa est le continent du sud. Sa forme est large au nord et étroite au sud. Chose étonnante, nos continents du sud, Amérique, Afrique, Asie (Inde), ont cette forme triangulaire. La vie y est moins heureuse que sur les continents oriental et septentrional mais c’est là que les bouddha apparaissent. Il est probable que dans un premier temps le terme désignait le sous-continent indien pour signifier ensuite notre Terre. On trouve également souvent l’expression ichi embudaï, yi yanfuti qui désigne la totalité du Jambudvipa.

5 Assez difficile à comprendre. Je suppose, comme cela se faisait encore au début du XXe siècle dans certaines régions méditerranéennes, que l’on se servait des longs cheveux de femme pour fabriquer des sortes de filets dans lesquels on mettait des arachides ou d’autres substances pour le pressage et l’extraction de l’huile. L’élasticité et la robustesse des cheveux tressés permettaient ce traitement. Ou bien, par un glissement de sens s'agit-il en fait de mèche pour les lampes à huile, l'usage de cheveux à cet effet étant courant.

6 Sumeru (ou Meru, Shumi) : La plus haute des montagnes, axe du monde dans la cosmologie de 1'Inde antique. Situé au centre des quatre continents gouvernés par les quatre grands rois du ciel, le Mont Sumeru est le paradis d'Indra, dieu du tonnerre, de 1'éclair, du vent et de la pluie, que le bouddhisme a incorporé à son panthéon de divinités protectrices.

7 Ces pièces sont appelées gamoku, ce qui signifie littéralement «œil d'oie», l'aspect de cette pièce percée au centre évoquait l'œil de cet oiseau. Le trou permettait d’enfiler ces pièces sur un cordon pour constituer une ligature.

8 sept joyaux (shippo, qibao), autre traduction : sept matières précieuses. Sept sortes de joyaux dont la liste varie légèrement selon les sutra. Dans le Sutra du lotus, ils ornent le stupa de Maints-Trésors qui apparaît dans le chapitre_XI Vision du précieux stupa. Il s’agit de l’or, de l’argent, du béryl, de la nacre, de l’agate, de perles et du corail. Dans la symbolique du bouddhisme du Lotus, ces sept joyaux sont mis en relation avec les sept trésors de la sagesse (shichishozaï) : l’écoute, la foi, les préceptes, la concentration, l’avancée, l’abandon et la retenue ou avec les sept ouvertures du visage (oreilles, yeux, narines et bouche). Nous trouvons cela notamment dans la Transmission orale sur les significations (Ongi kuden).

9 Bouddha Shakya sur la corolle (Taïjo no Shakabutsu) : expression apparaissant à la fin de la Réponse à dame Onichi (gosho de Nichiren). Taïjo représente la base sur laquelle le Bouddha est assis, c’est-à-dire une grande corolle de lotus. La statuaire bouddhique a abondamment représenté ce genre de bouddha Shakyamuni. Dans la Réponse à dame Onichi, cette expression évoque l’une des représentations parmi les plus majestueuses, honorées et visuelles du Bouddha.

10 Signature Kao (monogramme fleuri).