Nikko,
le successeur
intransigeant
I
Biographie
Nikko 日興 (1246-1333) est l'un des six moines aînés désignés par Nichiren. Il est issu d'une famille de samouraï, originaire de Kajikazawa dans l'ancienne région de Kaï, au nord-ouest du mont Fuji. On suppose que son père meurt quand il est encore très jeune et sa mère se remarie avec un homme du clan Tsunashima (綱島). Cette information s'appuie essentiellement sur un honzon inscrit par Nikko et qui est attribué au "nyudo Tsunashima Kyorodairo (綱島九郎太郎), beau-père (継父, keifu) de Nikko". Il est alors confié à son grand-père maternel, le nyudo Yuï (由比, Yuï est le patronyme de sa mère). Comme son nom l'indique, cet homme est un nyudo, c'est à dire un renonçant qui s'est tourné vers le bouddhisme et, lorsque l'enfant a six ans, il décide de le faire étudier dans un monastère Tendaï qui dépend du temple Jissoji (実相寺, temple de l'Aspect réel), et se nomme les Quarante neuf salles (四十九院) où il apprend l'écriture, la lecture des classiques, le chinois, bagage usuel des lettrés de cette époque.
Il reçoit l'ordination au Jissoji et
se voit conférer le nom de moine Hoki (伯耆房, Hoki
bo). Nous n'avons pas
d'information sur la raison pour laquelle on a choisi pour lui ce nom
religieux, ho (伯) : oncle
paternel, comte également dans les grades nobiliaires chinois
et ki (耆), l'ancien. C'est
généralement sous ce nom qu'il figure dans les rares
lettres de Nichiren dont il sera destinataire. Remarquons également que nous ne connaissons pas le nom laïc qu'il portait avant son noviciat. Ce serait en
1258, alors qu'il n'a que douze ans qu'il aurait été
remarqué par Nichiren. Celui-ci était venu
consulter la très riche bibliothèque du temple de
l'Aspect réel (cf. Devenir
le Bouddha,
Arfuyen 1993, les notes relatives à Le
principe d'Une pensée trois mille) .
Il devient son
disciple. Il suit
Nichiren et prend en note de nombreux enseignements qui serviront
plus tard à la rédaction de traités
notamment le Traité
sur la
pacification du pays et l'établissement
de l'orthodoxie (立正安國論, Rissho
ankoku ron). Toujours
très proche de
son maître, il l'accompagne dans les deux exils d'Izu et de
Sado et partage avec lui nombre d'épreuves.
Lorsque Nichiren
se retire au mont
Minobu, Nikko est
très actif auprès
des croyants de la région du mont Fuji qui n'est pas
très
éloignée. Il est l'élément
central de la
propagation du bouddhisme de Nichiren dans cette région. Il
a
pour disciples des moines, des officiels ou des guerriers locaux mais
aussi de simples paysans. Nichiren le dépêche
également
dans d'autres régions. Malheureusement, certains tenants des
anciennes écoles prennent ombrage de ce
développement
rapide et ses disciples religieux sont chassés des
monastères
et, à Atsuhara
trois paysans
qui ne voulaient pas renier leur
foi sont mis à mort par les autorités
locales (1279).
Il
prend en note les enseignements de Nichiren sur le Sutra
du lotus ce
qui deviendra plus tard la Transmission
orale sur les significations (御
義口傳, Ongi
kuden).
L'enseignement du Lotus
par
Nichiren, encore qu'il ne
s'agisse probablement pas des mêmes sessions, a
été
consigné par un autre disciple, Niko
(avec un seul k : 日向),
dans un
ouvrage appelé Notes
prises
à l'écoute de son
exposé (御講聞書, Onkokikigaki).
Si l'on compare les deux versions, celle
de Nikko est beaucoup plus riche en détails et plus
structurée.
Il fait partie des disciples
qui accompagnent
Nichiren lorsque celui-ci quitte le mont Minobu et
décède
dans la demeure des Ikégami. Il est l'un des six moines
aînés
nommés par Nichiren pour assurer les destinées de
la
nouvelle école de bouddhisme. Après la mort de
Nichiren
un système de garde de sa tombe au temple du mont Minobu
avait
été instauré selon ses
volontés. Les six
moines aînés devaient à tour de
rôle
résider sur place. Mais ça ne marche pas bien, le
mont
Minobu étant un lieu difficile d'accès et
éloigné
de leurs zones d'activités. Douze autres religieux leur sont
adjoints pour garder sa tombe, parmi eux huit disciples de Nikko. Au
désespoir de Nikko, ce système de rotation
fonctionne
avec beaucoup d'aléas. L'intendant domanial (jito, 地頭)), Nanbu Saenaga,
qui
avait recueilli Nichiren, nomme Nikko comme supérieur du
temple qui a été bâti sur place, le Kuonji,
et ce
système de rotation est abrogé.
En 1284, le pouvoir
militaire de Kamakura, le Bakufu,
veut
extirper le bouddhisme de
Nichiren de la capitale. Le plus vieux des moines
aînés, Nissho 日照 (1221-1323),
avait
adressé un mémoire aux
autorités où il reprenait les grandes lignes du Traité
sur la pacification du pays et l'établissement de
l'orthodoxie
et y ajoutaient même des critiques
sévères de
quelques courants religieux. Cela déchaîne la
fureur des
autorités, sa maison est attaquée. A la fois lui
et Nichiro
(日朗)
, son neveu, se
prétendent des réformateurs du
Tendaï pour calmer le jeu. Nikko qui au début de
cette
affaire est inquiet pour les croyants de Kamakura juge que l'attitude
des deux moines en charge des affaires sur place est indigne et il se
brouille avec eux. Niko
(日向),
un autre des six moines aînés
le rejoint. Ils veulent faire de ce temple du mont Minobu un foyer
d'enseignement de la loi pour les moines et Niko est nommé
instructeur. Mais les deux hommes finissent par s'opposer et le
seigneur Nanbu Saenaga prend le parti de Niko. Nikko décide
de
quitter le mont Minobu avec ses disciples en 1288 pour retourner
près du mont Fuji à Ueno. En 1290, Nanjo
Tokimitsu
(南条時光),
seigneur de Ueno lui fait bâtir un temple à
Oïshigahara (大石が原).
Ce deviendra le Taïsekiji (大石寺, Taïseki
étant un autre prononciation japonaise de Oïshi
: 大石),
centre
actuel de Nichiren Shoshu.
En 1298, il nomme six disciples pour lui succéder et confie le
temple
Taïsekiji à l'un d'entre eux, Nichimoku
日目(1260-1333). Les six disciples en question sont appelés
les six premiers moines aînés (honrokuroso, 本六老僧); on les
appelle ainsi pour les distinguer des six autres qui seront
nommés par la suite. Il part pour
Omosu
(重須),
région
de Kitayama (北山) où il fonde le Honmonji (本
門寺),
temple de l'Enseignement
originel. Les raisons qui ont poussé Nikko à quitter le
Taisekiji pour fonder un autre temple ne sont pas
particulièrement explicites. Selon certaines sources, il aurait
répondu à l'invite d'un ancien disciple, intendant local
et nyudo, un certain Ishikawamago Saburo Yoshitada (石河孫三郎能忠).
Après les huit ans passés à
assurer la
direction du Taisekiji, durant une trentaine d'années, Nikko
va
demeurer au Honmonji et diriger ce temple. Il est rejoint par Nitcho 日頂
(1252-1317), un autre des six
moines aînés qui, quelques années
auparavant,
avait dû quitter son temple du Guhoji et était
revenu
dans cette région dont il était originaire.
Jusqu'à
la fin de sa vie, Nikko demeure au Honmonji, forme des
disciples, écrit des traités où sont
consignés
l'enseignement qu'il a reçu et les règles de son
courant. En 1332, il nomme six disciples pour lui succéder
à la tête de l'école du temple de l'Enseignement
originel. Ce sont les six nouveaux
moines aînés (shinrokuroso,
新六老僧), pour les distinguer des six du Taisekiji. Il meurt en
1333, âgé de 87 ans, dernier survivant des six moines
nommés par Nichiren. Nikko
a été un disciple
très proche et
très fidèle de Nichiren et une figure marquante
des
débuts du mouvement nichireniste. Plusieurs
branches du bouddhisme de Nichiren se réclament de Nikko et
de
son courant généralement
désigné comme
le courant Fuji (富士門流, Fuji
monryu) ou le courant de Nikko (日興門流, Nikko monryu). Les
relations entre ces
diffèrentes branches dont les temples se situent dans la
région du mont Fuji et à Kyoto ont souvent ét
particulièrement agitées. Notons que vers la fin du XIXe
siècle (1876), les principaux temples de ce courant se sont
réunis pour former la Branche de l'école Ko de
Nichirenshu (日蓮宗興門派,
Nichirenshukomonha). En 1899 ce groupement change de nom pour s'appeler
Honmonshu (本
門宗),
mais cette entente ne devait pas durer plus de deux ans et le temple
Taisekiji fit sécession pour former le Nichirenshu Fujiha (日蓮宗富士派), lui-même renommé en 1912
Nichiren Shoshu (日蓮正宗). Depuis ces tendances aux schismes et parfois
aux regroupements se sont poursuivies et plusieurs écoles
revendiquent l'héritage de Nikko. Citons Nichiren Shoshu et Nichiren
Honshu ainsi qu'issus de schismes plus récents, le puissant
mouvement Sokagakkaï et Shoshinkaï.
II L'œuvre de Nikko En cours de rédaction Nikko transmetteur et rédacteur de l'enseignement oral de Nichiren L'œuvre
propre de Nikko. Prolèmes de cohérence et
d'authenticité. Manque de connaissance de cette œuvre qui nous est surtout connue par les
citations et les usages qu'en ont fait certains dans une
problématique étrangère à leur auteur.
Grand nombre de honzon inscrits. Pour ceux qui lisent le japonais on trouve une biographie détaillée, en plusieurs chapitres sur le site Shoshinkai. Le lien ci-dessus montre également un portrait apocryphe de Nikko ainsi qu'une lettre manuscrite. Voir aussi Nichiren biographie et Nichiji.
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